A la veille de l’adoption des Objectifs du développement durable (ODD) par les Nations unies, le ministère des Affaires étrangères et du Développement international et le réseau international francophone Genre en Action organisent ont réuni un colloque international pour dresser le bilan des conventions internationales en faveur des droits des femmes depuis 40 ans et de dessiner de nouvelles perspectives d’action pour l’égalité femmes-hommes dans le cadre de l’agenda du développement post-2015 avec Lakshmi Puri, Sous-Secrétaire générale des Nations unies et Directrice exécutive adjointe d’ONU Femmes.
Moins de deux semaines après sa rencontre avec le Prix Nobel birman Aung San Suu Kyi, Annick Girardin a pu échanger avec l’activiste turco-yéménite Tawakkol Karman, Prix Nobel 2011 pour son engagement en faveur des droits des femmes et de la liberté de la presse.
- Avec Lakshmi Puri et Tawakkol Karman
- Avec Lakshmi Puri et Tawakkol Karman
- Discours d’Annick Girardin
La secrétaire d’État a rappelé l’action et l’ambition de la France pour faire progresser l’égalité réelle entre les sexes dans le discours suivant.
Madame la Sous-Secrétaire générale des Nations unies et Directrice exécutive adjointe d’ONU Femmes,
Madame Karman, Prix Nobel de la paix 2011,
Mesdames les députées et sénatrices, Mesdames et Messieurs les représentants d’organisations internationales et de la Société civile,
Chers participants,
Je me réjouis de vous accueillir à Paris aujourd’hui à l’occasion de ce colloque international sur l’égalité femmes-hommes, organisé conjointement par le ministère des Affaires étrangères et du Développement international et le réseau international francophone « Genre en Action ». Je saisis cette occasion pour remercier toutes les personnes ayant contribué à cet effort commun : la tenue de ce colloque est pour mon ministère un événement important.
Nous sommes réunis aujourd’hui pour effectuer un bilan, celui de 4 décennies d’engagement et de mobilisation en faveur de l’égalité femmes-hommes, depuis la première conférence mondiale des droits des femmes en 1975.
40 années de plans d’actions, de politiques nationales et internationales, pour espérer en finir avec les inégalités économiques, politiques et culturelles, vaincre les violences faites aux femmes et aux jeunes filles, défendre le droit des femmes à disposer de leur corps et s’attaquer aux causes structurelles des discriminations à l’égard des femmes.
D’importants progrès ont été réalisés : pour l’éducation primaires des filles, l’accès des femmes aux ressources et opportunités économiques, leur participation à la vie économique, sociale et aussi politique.
Pourtant, aujourd’hui, à la veille du 20ème anniversaire de la plateforme de Pékin, que de chemin encore à parcourir : les jeunes filles ont toujours moins accès à l’éducation que les garçons : 65 millions d’entre elles ne sont pas scolarisées. Les violences de genre en milieu scolaire en sont l’une des raisons et la France, particulièrement mobilisée sur ce sujet, portera en avril 2015 une résolution sur cette question auprès de l’Unesco.
Les femmes ont également moins accès que les hommes à la formation professionnelle et à l’emploi. Elles sont surreprésentées dans le secteur informel de l’économie, et exercent plus que les hommes des emplois précaires et faiblement rémunérés.
Mesdames et Messieurs,
Les politiques, militants, experts et chercheurs que vous êtes le savent, 80% des victimes de la traite des êtres humains sont des femmes. Au niveau mondial, une femme sur trois est victime, au cours de sa vie, de violences physiques et sexuelles. Ces chiffres sont intolérables.
20 ans après la conférence de Pékin, de nombreux pays maintiennent toujours des lois discriminatoires, empêchant les femmes d’ouvrir un compte bancaire, de conduire une voiture ou d’hériter à part égale, quand elles ne sont pas tout simplement écartées de leur droit successoral.
Au rythme actuel des avancées, il faudrait encore 70 ans aux femmes pour bénéficier des mêmes opportunités que les hommes et 150 ans pour éliminer toutes les discriminations.
Ceci est inacceptable.
Nous devons donc rester mobilisés et proactifs. L’histoire nous montre que dans le domaine de l’égalité entre les femmes et les hommes, il n’y a jamais d’acquis. Dans les contextes de crise politique, de catastrophe naturelle ou d’épidémie, les femmes paient, la plupart du temps, le plus lourd tribut.
J’ai pu constater en Guinée combien le virus Ebola a un impact spécifique sur les femmes : près des deux tiers des victimes infectées ou décédées sont des femmes. Au Liberia, elles sont plus de 75%. Les femmes, du fait de leur rôle dans la société, notamment vis-à-vis des malades, sont plus exposées que les hommes.
Mesdames et Messieurs,
Il est grand temps d’accélérer la dynamique.
Les défis que nous devons collectivement relever sont considérables. Notre engagement se doit d’être à la mesure de ces défis. Toutes les énergies doivent être mobilisées, les expériences partagées pour nous assurer de la pleine inclusion de l’égalité femmes-hommes dans les politiques de développement et dans l’agenda post-2015.
La France, consciente de la nécessité d’accélérer les processus qui tendent vers l’égalité réelle, s’est engagée au plan national et international, à appuyer les politiques d’égalité femmes-hommes, leviers du développement.
Le 7 juillet de cette année, la promulgation de la première loi sur la politique de développement de la France, a consacré l’égalité femmes-hommes comme priorité transversale à nos actions.
La loi du 4 août 2014 pour « l’égalité réelle » entre les femmes et les hommes, et aujourd’hui, ce colloque, relève de la volonté de la France de soutenir la recherche et la société civile dans la mobilisation en faveur de l’égalité femmes-hommes.
Cette année, la résolution sur les violences envers les femmes présentée par la France, avec les Pays-Bas, à l’Assemblée générale des Nations unies, était centrée sur la lutte contre l’impunité. Elle concerne aussi pour la première fois les jeunes filles, en mentionnant clairement l’accès à la contraception d’urgence pour les victimes de violences sexuelles.
J’étais fin novembre au Sommet de la Francophonie à Dakar : dans leur déclaration finale, les chefs d’Etat et de gouvernement ont rappelé le rôle majeur des femmes, actrices du développement.
Il y a près de deux semaines, j’ai participé, en Birmanie, au deuxième forum international des femmes, avec Aung San Suu Kyi : la voix des femmes s’est élevée, rompant avec le statut de victime, pour montrer qu’elles sont actrices à part entière du changement.
L’année 2015 est une année cruciale.
Un nouvel agenda pour le développement durable sera adopté. Un objectif spécifique dédié à l’égalité femmes-hommes devrait y figurer.
2015 sera l’année européenne du développement. La Présidence lettone du premier semestre souhaite que l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes au sein de l’Union et au-delà de ses frontières figurent également à son agenda.
Nous fêterons aussi le 20ème anniversaire de la Conférence de Pékin et Paris accueillera la Conférence climat.
Ces événements seront autant d’occasions de noter les progrès accomplis. Mais aussi de prendre la mesure du chemin qui reste à parcourir. C’est l’objet même de ce colloque.
Le colloque d’aujourd’hui réunit des femmes et des hommes experts et engagés sur l’égalité femmes-hommes.
Vos débats et vos échanges permettront de nourrir notre réflexion et de faire avancer les droits des femmes.
La route est longue, un certain chemin a déjà été parcouru, grâce aux énergies conjuguées de celles et ceux, à tous les niveaux, qui ont porté ce combat, parfois au prix de leur propre vie. Ce petit bout de chemin, toutes ces petites victoires, nous donnent des raisons d’espérer, de persévérer, de poursuivre. Pour que plus jamais, nulle part, on ne soit discriminé en raison de qui on est.
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