Mercredi prochain, aura lieu le vote solennel sur le projet de loi de réforme des retraites, dont la discussion continue en ce moment.
Toutefois, le terme « discussion » n’est peut-être pas le plus approprié, car sur ce dossier tout est joué d’avance. Le Gouvernement est résolu à rester sourd à la mobilisation sans précédent des Français dans la rue, tout comme aux propositions défendues par les parlementaires, qu’ils soient de la majorité ou de l’opposition.
Pourtant, cette réforme aurait grand besoin d’être amendée ou, à défaut, d’être retirée afin de préparer une véritable réforme du système des retraites, au terme d’un vrai travail collectif, notamment avec les syndicats.
Car le système des retraites a véritablement besoin d’être réformé en profondeur, tout le monde est d’accord là-dessus. Mais là où nous proposons un changement radical du système, financé par de nouvelles ressources qui viendraient de la remise en cause des cadeaux fiscaux faits aux riches au cours des dernières années, le projet de l’UMP se limite à obliger les gens à travailler plus longtemps pour bénéficier de la retraite qu’ils ont mérité.
Pire, ces mesures injustes ne suffiront pas à combler le déficit du système de retraite, et le texte le reconnaît : le système sera équilibré jusqu’en 2018, et seulement en « pompant » les fonds mis de côté par le Fonds de Réserve des Retraites, instauré par la Gauche plurielle. En 2018, une fois que le Fonds sera vidé, il y aura à nouveau un déficit, et de nouvelles mesures pénalisantes pour les retraités seront nécessaires – c’est déjà prévu par le texte !
C’est pourquoi le PRG a demandé le retrait de cette réforme, afin d’entamer un Grenelle des Retraites qui permettrait d’engager le véritable processus de réforme en profondeur qui est aujourd’hui nécessaire.
Certes, l’Archipel a un fonctionnement différent et nous ne serons pas pénalisés dans l’immédiat par cette réforme, mais il ne faut pas se leurrer : plus les travailleurs et retraités de France seront pris pour cible, plus il sera difficile de défendre la nécessaire prise en compte de nos spécificités qui font déjà l’objet d’attaques régulières.
A ce titre, Annick GIRARDIN rejoint sans réserves la déclaration faite sur ce texte par ses collègues Gérard CHARASSE, député de Vichy et président des députés PRG, et Jeanny MARC, députée de Guadeloupe (lire les extraits des débats en fin d’article).
Le Député s’est également exprimé en radio ce midi sur le sujet des retraites :
***
Extrait des débats à l’Assemblée :
M. Gérard Charasse. Sur l’article 1er, je ferai deux réflexions. La première est générale puisque cet article pose les principes auxquels vous vous déclarez attachés : la pérennité financière du régime par répartition, son équité ; la garantie d’un niveau de vie satisfaisant pour les retraités. À ces principes, la commission a ajouté – ce sera l’objet de ma deuxième remarque – le rapprochement des règles entre les différents régimes.
Qui n’est pas, ici, en France, attaché à ces trois principes ? Cette forme d’unanimité sur les principes et, à l’opposé, les profondes divergences, les profondes divisions illustrées en particulier par la mobilisation sans précédent d’hier, sur les moyens d’y parvenir, signent une méthode qui doit convenir en certains lieux, mais qui n’est pas une méthode de gouvernement.
Car de deux choses l’une, monsieur le ministre : soit vous êtes sincèrement attaché à ces principes et vous convenez, comme tout le monde, que votre projet n’assure ni la pérennité, ni l’équité, ni la stabilité et vous acceptez donc de voir votre texte profondément amendé, soit – et c’est la version vers laquelle je penche après vous avoir vu gouverner par le verbe pendant trois ans, et avoir constaté que les mots tenaient lieu de réalité – vous êtes fermé sur votre texte parce que les principes que vous énoncez à l’article 1er ne sont pour vous que verbe, convenance, paroles, bref communication.
Vous êtes, à cet égard, monsieur le ministre, dans une nouvelle impasse et j’attends avec une certaine impatience de vous entendre sur le sujet.
Deuxième remarque : le quatrième principe avancé par la commission de convergence entre tous les régimes. J’imagine que, là aussi, le Gouvernement des sondages, par les sondages et pour les sondages a fait son œuvre et que l’énoncé du principe est censé valoir exécution, ce qui n’est pas le cas.
Mais nous, députés radicaux de gauche et apparentés, nous disons au Gouvernement : « chiche ! ». Oui, au nom de l’égalité, organisons la convergence entre les régimes mais faisons-le également dans l’égalité, c’est-à-dire dans la transparence et cherchons, pour chaque régime spécial, son origine. Car, bien souvent, le régime spécial a été, à sa création, soit une manière de soulager le régime général – avec souvent des cotisations de base majorées – soit un moyen de compensation lorsque les traitements de certains fonctionnaires étaient baissés. Je pense aux instituteurs quand les dix mois de traitement, puisqu’ils n’étaient pas payés l’été, ont été versés en douzièmes…
M. Dominique Tian. Pour les aiguilleurs, c’est pareil !
M. Gérard Charasse. …ou au choix d’une catégorie qui ne voulait pas relever de la solidarité nationale, ou encore à la décision – déjà ! – de prendre en compte la pénibilité qui, dans certains cas, s’est maintenue, voire aggravée.
Telles sont les deux réflexions que je souhaitais faire sur l’article 1er dont la mise en perspective avec le reste de votre texte révèle parfaitement le sens profond de votre démarche à laquelle nous nous opposerons si vous continuez de refuser d’entendre ce que nous avons à dire et à proposer. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à Mme Jeanny Marc.
Mme Jeanny Marc. En m’exprimant ce soir sur l’article 1er, je m’associe à ma collègue Mme Chantal Robin-Rodrigo, membre de notre groupe.
Les disparités de retraites entre hommes et femmes, tant au niveau des pensions que de l’âge de la liquidation, sont importantes. C’est d’ailleurs l’un des problèmes majeurs de cette réforme.
Le recul de l’âge de la retraite à taux plein à soixante-sept ans va jouer en défaveur des femmes. Elles parviendront encore moins à valider une carrière complète. Les chiffres sont là pour le rappeler. Les femmes valident plus rarement des carrières complètes leur permettant de bénéficier de retraites à taux plein. Rappelons qu’elles sont seulement 44 %, contre 86 % pour les hommes, à bénéficier d’une retraite à taux plein.
Le montant de leur pension reflète cette injustice : en droit direct, les femmes touchent 825 euros en moyenne contre 1 426 euros pour les hommes et elles représentent 57 % des allocataires du minimum vieillesse.
Selon les projections du COR, en 2040, il subsistera toujours une différence de niveau de pension de l’ordre de 30 % en faveur des hommes ! Autant dire qu’il reste encore un long chemin à parcourir pour parvenir à cette égalité pourtant inscrite dans la loi.
Le texte initial se contentait d’ailleurs de fixer comme objectif au comité de pilotage des retraites la réduction des écarts de pensions entre hommes et femmes. Autant renoncer, dans ce cas, à toute mesure qui viserait à remédier aux inégalités existantes.
Cette réforme, comme les précédentes, marque une régression de plus pour les femmes. Celle de 1993 les a davantage pénalisées en allongeant la durée des annuités alors qu’elles connaissent déjà des durées d’activité plus courtes. La réforme Fillon de 2003 – censée assurer le financement des retraites – les a encore plus désavantagées en raison des effets de la décote cumulés à une carrière incomplète. N’oublions pas que beaucoup d’entre elles vivent dans des conditions économiques précaires.
Où est l’égalité de ce système ? Ce n’est pas uniquement par le biais des retraites que l’on pourra corriger les inégalités entre hommes et femmes dans la vie professionnelle. Nous savons pertinemment que les femmes subissent encore plus que par le passé : temps partiel, développement du travail précaire, chômage, écart salarial… Donnons-nous enfin, par le biais de ce texte, les moyens de fixer des objectifs clairs au comité de pilotage des régimes de retraite. L’amélioration des conditions d’emploi des femmes n’est malheureusement pas encore à l’ordre du jour.
La rédaction actuelle de l’alinéa 12 me paraît donc insuffisante. Il nous faut aller plus loin. Au-delà de la question prioritaire de la réduction des écarts, nous devons agir tant sur les écarts entre les âges de départ à la retraite que sur l’amélioration du taux d’emploi des seniors.
Nous proposons de rédiger ainsi l’alinéa 12 de cet article : « L’annulation des écarts de pensions, d’âge moyen de fin d’activité et d’âge moyen de départ en retraite entre hommes et femmes ; » À l’évidence, ces critères nous paraissent plus pertinents pour agir sur l’égalité entre les hommes et les femmes en termes de pensions.
Mme Catherine Coutelle. Très bien !
0 Réponses à “Réforme des retraites – la méthode dure pour une réforme qui ne résout rien”